Serge

Le Brésil investit dans l’éducation des pays en voix de développement

(crédit photo: www.dce.mre.gov.br)

Le gouvernement brésilien est engagé depuis quinze ans dans un vaste programme de promotion éducative tourné vers les pays en voix de développement. Le PEC-G (Programme d’étudiants convenus) est un projet qui offre chaque année plus de 300 bourses d’études dans plusieurs domaines de connaissance: médecine, architecture, physique, technologie d’informatique, télématique, science politique, journalisme, biologie, ingénierie (de production, alimentaire, de matériaux, etc), cinema et audiovisuel, relations internationales, et autres. Le gros avantage de ce programme est que l’étudiant choisit son cours, la sélection des candidats étant complètement sous la direction des représentations diplomatiques du Brésil dans les différents pays; ce qui permet d’éviter la corruption et le clientelisme que l’on connait en Afrique. Un aspect très important de ce programme est aussi la diversité des pays impliqués, parmi lesquels la Barbade, le Bénin, l’Angola, le Cameroun, le Paraguay, la Bolivie, le Cap Vert, la Côte d’Ivoire, le Congo Brazzaville, la RD Congo, le Ghana, le Paquistan, l’Haiti, le Panama, le Cuba, El Salvador et j’en passe.

La diplomatie brésilienne emploie une approche différente pour augmenter son influence dans les pays en voix de développement en axant son action sur l’éducation, un investissement « sur la personne humaine » qui a déjà porté ses fruits lors de l’élection du directeur général de la FAO José Graziano da Silva. Il s’agit surtout de former une nouvelle élite dans les pays pauvres capables de s’exprimer en portugais et d’avoir une sensibilité particulière pour le Brésil. Remarquez le contraste avec les méthodes chinoises souvent taxées d’impérialistes…

les nationalités se côtoient

Pendant un moment, les appels de candidatures pour les étudiants africains ont été interprétés comme une façon de contourner l’absence d’afro-brésiliens dans les universités publiques permettant ainsi de camoufler un mal plus qu’endémique dans le pays de la samba. Toutefois, on constate aujourd’hui une évolution aussi bien dans l’augmentation du taux d’afro-brésiliens dans les UFs (universités fédérales) que d’africains. Avec son boom économique le Brésil attire des étudiants des pays anglophones, hispanique, francophones et bien entendu lusophones. Rien que pour l’année 2008 par exemple, au moins 97 édtudiants congolais furent sélectionnés, et pour l’année 2013, plus de 40 béninois traverseront l’Atlantique.

Le Brésil est un pays plein de contrastes. Je me rappelle encore quand je débarquais ici en février 2008, et que tout de suite je devais repondre aux questions telles que: « le Congo, c’est un quartier d’Angola? » ou encore « il y a des poules en Afrique?« , « qui est le président de l’Afrique« , « C’est Mandela le président de l’Afrique« . Non, je n’invente rien, des milliers de brésiliens croient que l’Afrique est un pays et que sa capitale c’est l’Angola; du coup, RD Congo, Rwanda, Mali, Burkina Faso et autres sont des villes ou des quartiers pour eux… Mais ils ne sont pas méchants. Il ne s’agit pas non plus de préjugés. En général, ces vastes pays comme le Brésil, les USA, la Chine ou l’Inde ont une population moyenne peu intéressée au reste du monde. Savez-vous par exemple que l’ancien président américain n’a quitté son Texas qu’une fois élu à la tête de l’Etat. Il paraît que la classe moyenne américaine n’est pas plus éclairée que celle du Brésil. Si la population des régions Sud et Sud-Est est particulièrement éduquée, le constat opposé s’impose dans les régions Nord et Nord-Est, d’où l’importance de ces échanges culturels qui visent aussi à familiariser la population brésiliènne avec les cultures étrangères, cela étant une exigence de la mondialisation.

C’est que la population brésilienne moyenne n’avait pas autant d’opportunités d’échange avec les « pays pauvres » – pardon pour l’adjectif… -, pour eux l’Afrique se resumait à l’Angola; heureusement il y a eu la coupe du monde 2010 pour changer tout ça et nous faire grimper sur « l’échelle des pays à visiter ».

2008, lors d’une visite culturelle avec des collègues

Mais il faut dire aussi que je vis une expérience extraordinaire depuis cinq ans. En effet, j’ai côtoyé des étudiants de plusieurs nationalités parmi lesquels des allemands – comme ils sont timides -, des norvégiens – ils sont très gentils et éduqués et ma foi, ils pensent que la vie est tellement facile -, des gens du Timor Oriental, un coréen, une costaricaine très mignonne, etc. C’est l’une des plus belles expériences de ma vie, connaitre tant de personnes venant de différentes cultures, ça nous grandit et nous fait tout relativiser. C’est peut être à cause de cela que je suis devenu un « relativiste »… Ici, on a un contact très fort avec les religions africaines, et aussi une vision moins entachée de préjugés vis-à-vis des homosexuels, etc.


Les présidentiables que les municipales brésiliennes ont révélés

Un scénario se dessine après les élections municipales qui se sont déroulées au mois d’octobre au Brésil. Au lendemain de ces élections, on peut déjà dire que la course à la présidentielle est lancée dans le plus grand pays du Cone Sul. Malgré le système politique fédéral bien installé ici, les élections municipales représentent un enjeu majeur pour les politiques brésiliens. En effet, les Brésiliens ont tendance à indiquer leur inclinaison idéologique dès les municipales, comme le disait le grand intellectuel des années 1940 Victor Nunes Leal, dans son livre Coronelismo enxada e voto – O município e o regime representativo no Brasil. Le livre explique l’autonomie relative des municipalités par rapport à la politique fédérale, tout en relevant leur importance dans le cadre des élections présidentielles.

Le Parti des Travailleurs a certes remporté la mairie de São Paulo, plus grande métropole de l’hémisphère sud, mais ces élections ont révélé des personnalités capables de bouleverser l’ordre établi dans la classe politique brésilienne depuis 1989. Modèle politique calqué du bipartisme américain, le système politique auriverdé est en passe de devenir tripartite.

Pendant les huit ans qu’il resta au pouvoir Lula da Silva avait réussi à garantir à son parti l’appui des régions les plus pauvres du pays, notamment le Nord et Nord-Est, néanmoins des transformations d’ordre social pourraient amener le PT à revoir son approche vis-à-vis de cette population. Désormais, une grande partie de cette population jadis pauvre fait partie de la classe moyenne brésilienne, c’est aussi elle qui porte l’économie nationale basée sur la consommation.

Au Nord et Nord-Est, la nouvelle classe moyenne boude le PT et flirte avec le Parti Socialiste Brésilien (PSB) d’Eduardo Campos, gouverneur du Pernanbunco (ce dernier a fait élire le maire de Récife au détriment du candidat proposé par le PT). Le PSB controle maintenant les plus grandes capitales de la région Nord-Est dont Fortaleza (Céara), Récife (Pernanbuco), l’état de Paraíba, et même la deuxième ville la plus importante de l’état de São Paulo avec la mairie de Campinas, encore une fois en battant un candidat du PT. Il s’agit là d’une importante avancée pour ce parti politique relativement jeune mais qui peut prétendre à quelque chose de plus grand: Brasília en 2014? Pourquoi pas?

Cela dépendra des différents accords que le PSB sera capable d’articuler, notamment avec le PSDB (social-démocrate), éloigné de la présidence depuis 2002 faute de renouveler son discours et de l’avoir trop droitisé… Mais cet exercice pourrait s’avérer particulièrement difficile, presque de la contorsion idéologique, car le PSB est un parti bien plus à gauche que le PSDB et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle il occupe les espaces qui appartenaient autrefois au PT. Une alliance avec la droite pourrait faire fuir des électeurs.

3427341094_ac6986eaabPour sa part, le PSDB a intérêt à rajeunir sa classe politique s’il veut revenir dans les bonnes grâces de la population brésilienne, surtout celle des régions les plus pauvres. Le sénateur Aécio Neves est donc l’homme providentiel pour le parti social-démocrate brésilien. Son histoire est assez particulière, puisqu’il est le petit-fils de Tancredo Neves, élu président du Brésil aux élections indirectes de 1985, et décédé peu avant le début de son mandat. Une histoire tragique qui est restée dans l’imaginaire du peuple et qui, dit-on, destinerait le petit-fils à accéder à la plus haute fonction du pays. Le sénateur Aécio Neves a été gouverneur de l’état de Minas Gerais (troisième par sa richesse après São Paulo et Rio de Janeiro).

C’est donc le scénario qui se dessine au Brésil après les élections municipales d’octobre. La présidente Dilma Rousseff est bien consciente du danger que représenterait une alliance entre les partis d’Eduardo Campos et Aécio Neves pour sa réélection. Une telle alliance pourait rencontrer un obstacle d’ordre psychologique, car on ne sait pas si l’un ou l’autre candidat se contenterait d’une éventuelle vice-présidence. Dilma Rousseff devra donc faire le possible – mais aussi l’impossible – pour séduire Eduardo Campos avant 2014 et isoler Aécio Neves si elle veut être sûre d’être réelue dans deux ans.


Pourquoi le système électoral brésilien dépasse celui des américains

Pour les non-avisés la comparaison peut paraitre forcée mais les Etats Unis d’Amérique ont bien de points communs avec le Brésil en matière de politique. Les deux pays ont adopté un sytème fédéral avec une organisation politique décentralisée. Pourtant, en plusieurs aspects les deux géants d’Amérique marquent une nette difference.

La démocratie a bien de significations selon les regions du monde que l’on parcourt, et même dans les pays occidentaux on retrouve diverses acceptions de ce régime. Les Américains ont leur régime présidentiel pour lequel les pères fondateurs ont errigés des multiples boucliers afin de préserver le peuple de la dérive autoritaires des tyrans. Les italiens ont leur regime parlementaire acquis avec tant de mal; la France se vante d’être le modèle planétaire de la démocratie, fort de son histoire révolutionnaire qui mit à mort l’ancien régime.

Je voudrais simplement revenir sur des aspects essentiels de ces deux modèles. L’Amérique a une tradition démocratique de plus de trois siècles – Alexis de Tocqueville l’a bien décrit dans son livre De la démocratie en Amérique – alors que le Brésil n’a que vingt petites années de démocratie stable. C’est peut être ce qui explique que du côté des brésiliens le vote soit obligatoire (trace d’un passé autoritaire ou soucis d’inclusion?); alors que dans le pays de l’oncle Sam le vote est facultatif. Néanmoins, un électeur brésilien peut tout de même se dérober à cet exercice politique et ensuite le justifier ou alors il peut se réserver l’option de payer une amende peut conséquente (moins de dix dollar américain).

La justice brésilienne est aussi très sévère à l’approche des élections, et ce envers les forces de l’ordre. Figurez-vous qu’au Brésil aucun électeur ne peut être arreté à deux jours des élections, une garantie républicaine contre toute tentative d’intimidation ou de manupulation du processus démocratique. Cette mesure est aux antipodes de la réalité américaine où même un candidat aux élections présidentielles peut être arreté.

D’un point de vue purement technique, le sytème de vote brésilien est plutot bien avancé par rapport à l’américain. En effet, le Brésil a  adopté depuis belle lurette les urnes électroniques – j’ai testé ce petit bijou il y a moins d’une année lors de l’élection du recteur de mon université et je peux vous dire qu’il s’agit d’un des modèles les plus fiables au monde. cette urne est aussi simple à manipuler qu’un terminal électronique de paiement.  

 Or les américains peinent à trouver un système fiable à 100 %, plusieurs observateurs on déjà fait état de pannes et de fraudes lors des derniers scrutins organisés chez nos amis les yankees. De plus, il semble que les appareils utilisés par les américains sont dépassés et datent de plusieurs années déjà. Le vote électronique présente plusieurs avantages dont la facilité pour les analphabètes. Dans un système qui se veut inclusif comme celui du Brésil, il faut necessairement faire attention à ce genre de detail, vu le taux assez élevé de l’analfabetisme (13 millions en 2010, desquels 39% sont des personnes agées). La fiabilité de ce système est telle que les résultats de chaque élections sont connus deux heures après (maximum) le scrutin, un scénario semblable à celui de 2000 aux Etats Unis étant impossible ici. Il est vrai que ce contretemps était dû à la polémique de Floride et sur la différence des grands électeurs…

Le système américain parait assez compliqué de prime abord et on ne perçoit aucun signe de changement à court terme pour ce modèle qui a déjà prouvé qu’il pouvait être très contestable. Quant au vote obligatoire, je suis pour ma part favorable à la liberté de choix de chacun, et il revient aux politiques de convaincre les électeurs d’aller aux urnes. D’ailleurs, ce thème fait débat au Brésil même si je ne crois pas que le parlement (qui siège à Brasília) modifie un système qui a fait ses preuves depuis 1989.

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La presse brésilienne préfère Obama

Obama fait l’unanimité au Brésil. Cela n’a rien d’étonnant au pays du football. En effet, l’élection de Barack Obama serait beaucoup plus avantageuse pour les brésiliens qui ont encore dans la mémoire les dérives autoritaires du gouvernement Bush. Quoique Mitt Romney ait promis de regarder particulièrement vers l’Amérique Latine, cela n’a pas séduit la presse dominante du Brésil, ni même l’opinion publique.

 Malgré sa promesse de « s’ouvrir » à la l’Amérique Latine, contrairement à Obama qui s’est rapproché de la Chine durant son premier mandat, Mitt Romney ne donne aucune indication que son gouvernement ferait du Brésil un partenaire de premier plan. D’abord, les récentes positions de Lula en faveur d’un rapprochement avec Téhéran sont loin de plaire au candidat républicain; ensuite, les critiques de Dilma Rousseff contre les Etats-Unis (la présidente du Brésil a défendu le régime cubain lors de sa vite sur l’île) rendent difficil des rapports privilégiés entre Brasília et Washington en cas de victoire républicaine.

Pour Mitt Romney d’autres pays d’Amérique Latine seraient des partenaires beaucoup plus naturels, tels que le Paraguay, le Méxique ou la Colombie. En outre, Obama a déjà montré qu’il était favorable à un partage des responsabilités avec le Brésil dans la gestion des crises régionales dans le continent en acceptant par exemple la médiation de Brasília dans les négociations avec les FARC.

Cette préférence pour Obama est aussi une question de style dans la mesure où l’actuel locataire de la Maison Blanche est un  afro-américain et de ce fait touche l’imaginaire brésilien favorable au métissage des peuples. Par ailleurs, Obama a presque les mêmes caractéristiques que Lula da Silva; président relax, informel par moment, et libéral sur plusieurs dossiers comme celui de l’avortement et du mariage gay. Mitt Romney transmet l’image d’un moraliste, aux coutumes puritaines qui n’agréent pas l’opinion publique brésilienne. Que ce soit en matière de politique économique, de géopolitique ou de moeurs, la presse brésilienne a déjà choisit son camps.


L’épopée de Fernando Haddad

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paulo, c’est 1 523 km² pour 11.253.503 d’habitants. C’est aussi le plus grand pôle industriel d’Amérique Latine avec plus de 20 000 usines. Une grande partie de l’industrie automobile du Brésil et d’Amérique Latine se concentre à São Paulo qui detient aussi le plus grand contigent populationnel du continent. L’économie de la ville est très moderne et s’oriente essentiellement vers le secteur privé qui domine surtout le demaine de la santé avec plus de 78% d’activité. Enfin, São Paulo , ville multiculturelle, est le plus grand collège électoral du Brésil.

 Depuis la fin de la dictature en 1989, la ville de São Paulo n’a eu que deux gouvernements de gauche (1989-1993 et 2001-2004 ), ni la période hégémonique de Lula da Silva n’y a changé quoi que ce soit. Les experts en politique brésilienne affirment que cela est dû au niveau de bien-être social atteint dans l’Etat le plus riche du pays où la plupart des habitants appartient à une classe moyenne très dynamique. La population de São Paulo est connue pour sa tendance à « voter à Droite », tout en étant très hostile à l’immigration en masse vers la capitale économique du pays qui attire des millions de personnes venant de tous les pays voisins et même d’autres Etats brésiliens.

Le Parti des Travailleurs était face à un défi historique, celui de faire élire un maire dans un Etat acquis à la droite, et ce, au beau milieu d’une affaire de corruption qui acablait ses principaux leaders politiques dont José Dirceu et José Genoino. L’ex-président Lula avait intérêt à lancer un candidat au-delà de tout soupçon. C’est ainsi qu’il a propulsé l’ancien ministre de l’éducation Fernando Haddad, docteur en philosophie de l’Université de São Paulo (USP). Haddad (d’origines libanaises) a eu une visibilité nationale après avoir fait de l’examen Enem (l’équivalent brésilien du Baccalauréat) un critère d’admission aussi bien dans les universités fédérales que privées.

Donné perdant au début de la campagne électorale, et en concurrence directe avec des adverssaires de poids, dont un « vieux loup », José Serra (PSDB), et aussi un candidat improbable (Celso Russomano) qui est vite devenu la sensation de l’année, le candidat du PT Fernando Haddad s’est frayé un petit chémin jusqu’au segond tour des élections municipales. S’il est vrai qu’au début de la campagne pour le premier tour, Fernando Haddad apparaissait avec un modeste 19% et pointait seulement à la troisième palce; à cinq jours de la tenue du second tour il ostentait des intentions de votes très flatteuses: 49% contre 32% pour Serra (surnommé le vampire par la presse partisane de gauche). Lors du premier tour, Celso Russomano comptait avec l’appui des évangélistes alors que José Serra avait réçu le soutient des grands médias.

L’incroyable épopée de Fernando Haddad se doit à l’immense popularité de Lula da Silva, à la bonne gestion de la très sérieuse Dilma Rousseff, mais aussi au charisme du nouveau maire de São Paulo. Fernando Haddad a apporté une touche de modernité à la campagne électorale dans une ville habituée à un discours conservateur. Ses origines de classe moyenne ont aussi oeuvré à son avantage puisqu’il parlait à ses semblables. Le fait qu’il soit lui-même fils d’immigrés fut un atout étant donné le niveau de métissage dans l’Etat de São Paulo. Si certains analystes pensaient que le départ de Lula scellait le déclin du PT – avec l’élection de Fernando Haddad avec 56% de votes – ce parti vient de montrer son incroyable capacité de rénovation.

En attendant, peu importe le maire, São Paulo a toujours les mêmes problèmes de violences urbaines et d’embouiteillages…

Interview du maire de São Paulo.


Les héros de Rio 2016

Les athlètes paralympiques brésiliens accumulent les bons résultats depuis les JO de Beijing 2008 et ont répété la dose à Londres 2012. Si les américains ont Michael Phelps, les brésiliens ont bien leur Daniel Dias national; cet athlète qui  avait raflé 11 médailles d’or aux jeux parapanaméricains de 2007. Ce n’était que le début pour ce nageur né sans pieds et et sans mains. A Beijing, comme un air de déjà-vu, c’est Daniel Dias et non Phelps que l’on vit remporter 4 médailles d’or, 4 d’argent et un dernier de bronze quelques semaines plus tard.

Qui aurait pu le croire? Et pourtant, quand j’étais jeune on me parlait du plus grand joueur de football de tous les temps, un certain roi pelé. Toute sorte de mythes étaient racontés à son sujet, comme celle qui disait qu’il aurait marqué un but lors d’un match qui opposait le Brésil et une équipe indienne à mille joueurs. A l’époque, c’était tout ce qu’un jeune congolais pouvait savoir sur le Brésil, et occasionnellement, que ce pays possédait la plus grande forêt de la planète qui reléguait la RDC à la deuxième place (grace à sa forêt équatoriale). Ensuite, il y a eu le film Anaconda. Et quel film! Holywood se chargeait de créer l’image d’une Amérique Latine exotique semblable  à un jardin d’Éden où l’on pouvait aussi trouver des monstres venus d’un roman de Jules Vernes.

Mais, les choses ont changé depuis ce temps. Le monde découvre un autre pays modèle de developpement et de croissance économique, rêve de tous les investisseurs internationaux.  Le Brésil est maintenant la sixième économie mondiale et compte avec le cinquième plus grand marché interne devant la France. Ce succès économique touche à tous les domaines de la vie brésilienne, spécialement au sport, et pas seulement au football.

Aux JO de Londres les athlètes paralympiques ont atteint une marque historique en remportant pas moins de 43 médailles dont 21 d’ or, 14 d’argent et 8 de bronze figurant ainsi à la séptième place au tableau général des médailless. Personnellement j’ai une grande sympathie pour ces athlètes paralympiques. Les médias ne parlent pas assez d’eux et pourtant ils sont aussi forts que leurs collègues stars des autres sports tel que Cesar Cielo le monstre sacré de la psicine recordman des 50 mètres à Beijing qui s’entraine depuis des années aux Etats-Unis à côté d’un Serge Busquet, champion de la natation française.

Le Comité Paralympique Brésilien (CPB) a compris qu’il faut investir sur ces sportifs peu connus des médias mais à la dédication infinie et qui ont déjà montré leur valeur. Les préparatifs vont bon train aussi bien sur le plan des infrastructures avec par exemple la construction de l’autoroute transcarioca, que sportif. Rio de Janeiro s’apprete à voir les exploits des ses dieux paralympiques, un privilège que les chinois et les londoniens étaient seuls à connaitre. Vivement Rio 2016!


Quand un feuilleton surclasse la politique

La campagne électorale bat son plein au Brésil et les partis politiques font face à une sérieuse concurrence. Un feuilleton de la TV Globo a battu tous les records d’audience de la télévision brésilienne atteignant une moyenne de 80 millions de téléspectateurs par jour. Avenida Brasil raconte l’histoire d’une femme, plutôt machiavélique, et qui malgré son esprit diabolique se tire d’affaire à chaque fois. Alors, cela choque assez les brésiliens, ce peuple tellement bienveillant, mais qui n’hésite pas à lyncher les petits pervers du quartier.

Quand un feuilletonn met en scène la vie d’une femme opposée à la norme sociale très puritaine du Brésil, cela se transforme très vite en une tragédie shakespearienne. Dans les derniers épisodes, la jeunne femme – Carminha – est enfin découverte, et son mari la surprend avec un autre homme. Les téléspetateurs s’ attendent à ce que le châtiment soit à la hauteur de ses crimes. Après tout, le feuilleton a duré près de huit mois et les manigances de Carminha ne sont découvertes qu’à deux semaine de la fin. Les réalisateurs de la série l’ont bien compris et proposent trois épisodes où la jeune femme se fait tabasser par le premier venu. Justice nue et crue…

Petite parenthèse, au Brésil, quand on agresse une femme, on va en prison sans paiement de caution. Mais bizarrement pour une société qui lutte tellement contre la violence faite à la femme, les scènes ont plu à plus d’un. Le feuilleton a atteint une audience faramineuse sur ses derniers épisodes allant jusqu’à faire annuler plusieurs meetings du plus populaire des partis politiques du pays.

(Lula en campagne, 2012)
(Lula en campagne, 2012)

Et oui! Le parti des Travailleurs (PT) du grand Lula da Silva a dû annuler ses meetings à Salvadore puis à São Paulo. Les organisateurs avaient fait coincider ces événements politiques avec l’horraire de difusion du feuilleton, causant un contre-temps aux politiciens qui, étant à quelques jours des élections municipales, s’attendaient à une radicalisation des discours. Ces derniers étaient alors surpris par les effets contraires produits par le feuilleton: climat d’amour, scènes érotiques, intrigue policière, etc.

Pour la petite histoire, il ya de cela quatre ans, le chanteur canadien Michael Bublé était venu faire une tournée au Brésil et lorqu’il passa sur la plus grande chaine de télévision du pays, affirma au présentateur de l’émission que son audience était supérieure à la population canadienne. C ‘est dire à quel point les feuilleton brésiliens sont absolument incontournables.


Le noir qui présidera la Cour Suprême

Joaquim Barbosa présidera la Cour Suprême de Justice du Brésil pendant deux ans. Pour la première fois dans l’histoire du pays, un noir occupera l’une des plus hautes fonctions de l’Etat. Car au Brésil, les membres de la Cour Suprême jouissent d’un status institutionnel supérieur à celui du président de la république. Cela se démontre aussi par le fait que les juges de cette cour ont le salaire le plus élevé de la fonction publique: 27000 reais par mois.

Ce docteur en droit public de l’Université Paris II s’est distingué pendant ses études secondaires puis universitaires à Brasília. Il a vite obtenu un master en droit étatique avant d’aller poursuivre ses études en Europe. Polyglotte, le « ministre » Barbosa parle cinq langues dont le français. Elevé dans une famille de huit enfants dans la plus grande misère du Brésil, Joaquim Barbosa représente la mentalité brésilienne qui consiste à ne jamais abandonner. Au pays du football, on peut trouver des milliers d’histoires comme celle de ce juge.

Pendant longtemps, les noirs brésiliens n’avaient pas de perspectives de croissance professionnelle dans la sphère politique. Pour eux, il n’ y avait que deux options: le football et la musique. Et parfois une troisème dans le crime. Avec des icônes tels que Pelé et Ronaldinho dans le sport, ou Gilberto Gil dans la musique, les noirs savaient leur place dans la société. Leurs héros étaient des stars du sport ou de la musique. Maintenant, les choses changent. Après l’ascension au pouvoir d’un prolétaire – Lula da Silva -, c’est au tour d’un originaire de ParacatuMinas Gerais – de monter sur le devant de la scène politique brésilienne.

Le juge Barbosa est connu pour son positionnement très libéral s’étant illustré à plusieurs reprises comme un progressiste. Il a defendu le mariage entre homossexuels, et a été  favorable à la recherche sur les cellules souches – sujet polémique ici -. Ces derniers mois, Joaquim Barbosa s’est distingué dans le jugement du Mensalão.

Si l’Amérique a surpris le monde en élisant son premier président noir, le Brésil montre encore une fois qu’il s’opère des changements dans sa structure sociale. Encore un élément qui fait du Brésil un géant de ce siècle. La présidence de Joaquim Barbosa commence le 22 novembre…