Twitter, thermomètre du climat politique au Brésil

Même si l’application Whatsapp a été un élément clé dans l’élection du président Jair Bolsonaro, c’est désormais Twitter, l’oiseau bleu de Jack Dorsey, qui mène la danse du débat politique au Brésil. Chaque jour, gauche et extrême droite se livrent une véritable bataille idéologique sur ce réseau social pourtant très porté sur l’économie des mots.
Au commencement, était l’application Whatsapp
On s’en doutait bien depuis le début de la campagne électorale, mais c’est le journal Folha de SP qui a dénoncé le rôle joué par Whatsapp dans la campagne électorale du président Bolsonaro. Selon le quotidien paulistano, des entreprises privées ont investi jusqu’à 12 millions de reais pour financer un système d’envoi massif des messages sur Whatsapp. Une forme de financement illégal de la campagne qui a par la suite été confirmé par une source espagnole. Depuis, Whatsapp a limité l’envoi des messages simultanés à cinq destinataires.
Le Brésil n’est pas le seul pays où les élections ont été entachées par l’usage d’applications de messagerie directe. L’Inde est également touché par ce nouveau phénomène. A partir de 12’23 »:
Sur Twitter, Carlos Bolsonaro dicte les règles
Pourtant, depuis la fin de la campagne, c’est Twitter qui est devenu le nouvel espace d’affrontement entre la gauche et l’extrême-droite. Des deux côtés de l’échiquier idéologique, quelques comptes Twitter se distinguent plus que d’autres. Le fils du président, Carlos Bolsonaro, élu municipal à Rio de Janeiro, est l’un des principaux agitateurs de la twittosphère brésilienne avec plus d’un million de followers. Il n’hésite pas à s’en prendre directement aux ministres de son père.
Le dernier à en faire les frais n’est autre que le chef de la sécurité du président, le général à la retraite Augusto Heleno, qu’il accuse de négligence, voire de quelque chose d’encore plus grave… on en saura pas plus puisque Carlos Bolsonaro opère par sous-entendus. Le détonateur de la polémique ? L’appréhension à Séville de 39kg de cocaïne dans un avion de délégation du président qui se rendait au sommet du G20.
Via @snapnaro pic.twitter.com/lA5PyWRWxw
— Carlos Bolsonaro (@CarlosBolsonaro) 1 de julho de 2019
C’est aussi sur Twitter que Carlos Bolsonaro a directement attaqué trois autres ministres, parmi lesquels le général Santos Cruz, démis de ses fonctions quelques jours après. Santos Cruz a notamment dirigé deux missions de l’ONU en Haïti et au Congo. Autant dire qu’il ne s’agit pas de n’importe quel général.
Militares que não suportam armas. Nunca lideraram nem guerra de travesseiros! O país dos absurdos! pic.twitter.com/HMzOeD70b1
— Carlos Bolsonaro (@CarlosBolsonaro) 3 de julho de 2019
Une droite très active sur Twitter
Lorsque Carlos Bolsonaro ne twitte pas, il faut souvent suivre deux autres comptes très actifs quand il s’agit de s’en prendre directement aux personnalités de gauche ou de droite. Il n’agit du compte anonyme Isentões, très renseigné et qui publie des informations financières assez compromettantes pour les différentes administrations de gauche.
6/8) A empresa também já recebeu R$ 13,8 milhões em 2019, referente a contratos firmados este ano ou nas administrações anteriores. Veja na imagem: pic.twitter.com/gcicP3bzVc
— Isentões (@lsentoes) 3 de julho de 2019
Lorsque l’affaire des messages secrets du juge Sergio Moro a éclaté, l’un des comptes à s’en être pris au journaliste américain Glenn Greenwald ainsi qu’à son site The Intercept Brasil est celui de Bernardo Kuster. Le Youtubeur très connu dans les milieux de droite et d’extrême-droite totalise plus de 250 mille followers sur Twitter. Il n’hésite pas à brocarder directement des juges de la Cour suprême.
É contra este blá-blá-blá inócuo que o povo foi ontem às ruas! https://t.co/pYJCpIQfGO
— Bernardo P Küster 🇧🇷 (@bernardopkuster) 1 de julho de 2019
Ce n’est pas pour rien que les hommes politiques de droite, de gauche, d’extrême-droite s’activent autant sur le réseau social fondé par Jack Dorsey. Ces derniers mois, aussi bien les grands médias que le gouvernement ont modifié leur agenda au gré de l’humeur sociale sur Twitter. C’est donc à une véritable guerre idéologique que l’on assiste, bien que celle-ci comporte des risques de manipulation et autres propagations de fake news, des deux côtés, il faut bien l’admettre.
Des infographies pour arbitrer le jeu des hashtags

Il y a cependant un autre compte Twitter qui se distingue par la qualité des infographies qu’il publie. Le professeur Fabio Malini dirige un laboratoire dédié à l’analyse des big data à l’Université Fédérale do Espírito Santos. Il s’emploie à arbitrer le jeu des débats politiques sur Twitter en publiant toutes les semaines les mots-clés les plus utilisés sur la plateforme. L’une des dernières infographies montrait que l’ancien juge Sergio Moro, tombeur de Lula et aujourd’hui ministre de la justice, a bénéficié d’un soutien sur Twitter inférieur aux opinions critiques à son égard.
O que foi publicado (https://t.co/g1b5gyPa7Y ) pela @monicabergamo, agora, em imagem (RTs/Menções). Ao coletar apenas o termo « Moro » e sf_moro, há mais interações geradas pelos críticos ao ministro da Justiça. Apenas 35.81% o apóia no Twitter. pic.twitter.com/2VKFlqq7bf
— Fabio Malini (@fabiomalini) 23 de junho de 2019
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