Brésil: pas prêt pour un président noir

Aujourd’hui, je voudrai revenir sur un personnage important de la politique brésilienne; j’en ai parlé lorsque ce blog a démarré en 2012. Noir, président de la Cour Suprême de Justice, Joaquim Barbosa est le chouchou des médias, l’ogre de la gauche radicale et de temps en temps, l’épine sous le pied de Dilma Rousseff.
Ce lundi 29 juillet, le ministre Joaquim Barbosa déclarait que « le Brésil n’était pas encore prêt à voter pour un président noir ». Pas faux. Mais cela est aussi le signe de la grande complexité de la société brésilienne, d’un côté vous avez une société hautement machiste capable d’élire une femme à la présidence de la République, et de l’autre une société métissée incapable d’offrir les clefs du Palácio do Planalto à un noir.
Le personnage adore les polémiques, toujours dans les bons coups médiatiques surtout depuis sa chasse à l’homme contre la corruption lors du symbolique procès du mensalão qui l’a définitivement brouillée avec le Parti des travailleurs (PT) de Lula. Sa dernière sortie médiatique en présence de la présidente Dilma a fait l’effet d’une bombe. C’était le jour de l’arrivée du Pape François, à l’aéroport de Rio de Janeiro… Le président de la Cour Suprême ignore Dilma Rousseff, serre la main du Saint-père et passe à côté. Voyez plutôt…
Normal, on pouvait s’y attendre depuis les prises de becs par médias interposés entre Joaquim Barbosa et la classe politique brésilienne.
Il jouit d’une énorme popularité chez les pauvres et je dirai la classe moyenne. Ayant fait des études brillantes à Brasília (puis en France) sans l’aide des politiques de quota – les affirmatives actions – , il n’hésite pourtant pas à se définir comme une exception.
Le problème n’est pas que racial. Même s’il se portait candidat, Joaquim Barbosa n’a aucune base politique; et si d’aventure il était élu, ce serait encore plus difficile de se maintenir au pouvoir sans une base parlementaire. En plus, la candidature de Barbosa ne servirait qu’à diviser une base électorale qui normalement vote pour le PT, soit les brésiliens plus pauvres.
Les médias conservateurs aimeraient en faire un candidat en 2014 et profiter de sa popularité, un atout dont ne dispose plus le Parti Social Démocrate (PSDB), mais Joaquim Barbosa ne prétend pas se frotter au PT, donc à Lula. C’est ce dernier qui l’avait nommé à la Cour Suprême. Je ne vois pas Joaquim Barbosa prendre le risque de déposer sa confiance en ces mêmes médias qui ont porté Fernando Collor à la présidence au début des années 1990 avant de le faire éjecter deux ans ans plus tard.
Le ministre Barbosa est plutôt de ceux qui défendent un pouvoir judiciaire plus puissant au Brésil, surtout depuis que le législatif et l’exécutif se sont discrédités par les scandales de corruption. Ce n’est donc pas un fervent partisan du balance of powers cher à Montesquieu.
Le fait est que, le ministre Barbosa emploie des tactiques populistes, or cela n’a jamais fait de bons princes.
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