#JO2016 : est-ce le Brésil ou le Brésilien qui a changé ?
Fini le Brésil paz e amor que tout le monde connaissait. Révolu le temps où les filles de Rio vous accueillaient sur les plages cariocas avec un grand sourire, vous promettant tous les plaisirs de la terre. Quelque chose a vraiment changé dans ce pays. Finie aussi la naïveté de ces Brésiliennes qui ont passé la cinquantaine mais désirent néanmoins retrouver la joie de vivre de leurs dix-huit ans. La crise politique et les scandales politiques ont achevé un mythe qui n’avait que trop duré.
Il y a à peine huit ans, je débarquais à l’aéroport de São Paulo avec mon sac à dos et mes rêves – littéralement. J’en ai réalisé quelques uns, le reste suivra. Mais l’atmosphère paisible, candide et rafraîchissante d’il y a quelques années a disparu. Le Brésilien est plus morose que jamais, les gens suspicieux et méfiants, les conversations ont maintenant plus de chances de dégénérer qu’auparavant. Les différences idéologiques sont plus visibles qu’avant.
C’est ce Brésil-là que le touriste qui viendra pour les Jeux Olympiques rencontrera. Il ne faut pas se faire d’illusion. Le « Brésil paz e amor » n’existe plus.
Des réformes qui passent mal
La crise économique frappe impitoyablement des Brésiliens mal habitués par Lula da Silva à une consommation compulsive ; de sorte qu’aucun gouvernement, même en temps de crise, ne pourra les convaincre qu’une cure d’austérité est nécessaire – je ne dis pas que ce soit la solution, mais c’est bien le message que le gouvernement intérimaire transmet.
Pourtant, le président Michel Temer vient d’approuver une augmentation des salaires des magistrats à hauteur de 40 %, ce qui équivaut à un montant de 58 milliards de reais. Or, juste après sa prise de fonction, Michel Temer annonçait un déficit budgétaire de 178 milliards. Bonjour la cohérence !
De plus, l’image du Parlement tirée de la session de votation de la destitution de Dilma Rousseff, n’a toujours pas été digérée. J’en parlais encore hier avec une vendeuse d’un kiosque du quartier… Le sentiment général est que toute la classe politique est corrompue. Cependant, s’étonne le journal El Pais, depuis le mois d’avril, les instituts de sondage n’ont publié aucun rapport sur la popularité du président intérimaire Michel Temer.
Un goût prononcé pour la farce politique au #Brésil: Le vote final sur la destitution prévu en pleins #JO2016 https://t.co/83XIPR32vj
— Adèle Smith (@adelesmith100) 6 de junho de 2016
Une image internationale très négative
Quant aux #JO2016, il faut dire que les nouvelles ne sont pas très encourageantes. Les stars internationales sont de plus en plus nombreuses à annoncer leur défection: Stephen Curry, Westbrook, Harden… et on se demande si c’est à cause du virus Zika.
#JO2016 : Curry n’ira pas à Rio https://t.co/uDMYoTc1wW
— RMC Sport (@RMCsport) 6 de junho de 2016
Par ailleurs, on apprend que plusieurs fonctionnaires de l’Etat de Rio de Janeiro n’ont pas perçu leurs salaires, les retraités étant les plus affectés.
Le maire de Rio dénigre le Mondial 2014 pour valoriser les JO #Rio2016 #JO2016 https://t.co/6v4kjZJ87E pic.twitter.com/Rzx277sfx4
— francetv sport (@francetvsport) 7 de junho de 2016
C’est dans ce cadre que le touriste débarquera à Rio de Janeiro. Il trouvera un pays divisé, une population inquiète et impatiente, une instabilité politique et une crise sanitaire qui affecte surtout les plus pauvres. La montée en puissance de l’extrême droite au Brésil fait aussi qu’il est plus dangereux aujourd’hui d’exprimer ses idées politiques lorsqu’on ne connait pas personnellement ses interlocuteurs (et même, cela n’est plus une garantie). J’ai récemment failli me faire piéger par une collègue doctorante aux idées conservatrices et passablement agacée par ma manière d’interroger ses arguments qui, pour le coup, me paraissaient assez réducteurs…
Alors, est-ce le Brésil ou le Brésilien qui a changé ? La réponse est peut-être un moyen terme entre ces deux assertions : une forte crise structurelle frappe le Brésil et porte un sérieux coup au moral d’une population qui a, depuis quelques années, oublié comment souffrir en silence.
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