Avortement au Brésil: Il faut « tuer » le roi
Le débat sur l’avortement au Salvador est relancé au parlement comme dans les instances de Justice de ce pays. Qu’en est-il au Brésil?
Autant en 2013 la France est capable de montrer au monde les vestiges de la révolution qui tua un roi (mariage pour tous), l’avortement est bien le sujet qui divise le plus la société brésilienne.
Cependant si le débat est aussi houleux et radical c’est parce qu’il est contaminé par plusieurs préjugés de part et d’autres.
Il est certain que ces lignes portent quelques préjugés dus au vécu de leur auteur.
Conservateurs et progressistes:
D’un côté, les conservateurs – en grande partie catholiques – ne veulent pas accepter l’idée d’une société dans laquelle la femme serait maître de son corps, émancipée des préceptes religieux et machistes. De l’autre, il y a les groupes progressistes, souvent jeunes, sans parti politique clair, ou du moins, cela n’est pas l’élément le plus important dans ce cas. Les jeunes brésiliens, surtout ceux des classes moyennes ne sont pas forcément de droite ou de gauche – ils préfèrent les extrêmes. Et leurs profils changent selon les villes et les Etats. Mais, ils veulent être libres, ils sont la « génération post-dictature ». Avec eux, les professeurs, les defenseurs des droits de l’Homme, les mouvements féministes, etc.
Souvent les paulistas et les cariocas sont conservateurs, les sudistes (Porto Alegre, par exemple) plus progressistes, peut-être à cause de leur proximité historique par rapport à l’Europe.
Mais malgré tout, le dossier de l’avortement n’avance jamais. Aucun candidat n’ose s’attaquer à ce sujet par peur de vexer les protestants (notamment les évangelistes) et les catholiques qui forment un front commun quand il s’agit de défendre la morale chrétienne. Ils ne sont pas aussi clément quand il faut s’opposer à la violence policière. Au contraire.
Redéfinir le débat:
Au Brésil, lorsqu’on aborde le sujet de l’avortement, même dans les universités, la passion dépasse toujours la raison, comme le disait Sergio Buarque de Holanda: « le brésilien est un homme cordial » *. Les gens sont pour ou contre l’avortement, en toutes circonstances. Or, dans l’état actuel des choses où des milliers de femmes meurent parce qu’elles cherchent à avorter dans l’ilégalité, il faut dépasser cette façon réductrice d’aborder le problème.
Lula avait, lui, dénoncé ce conservatisme qui fermait les yeux devant un problème de santé public…
Les choses avancent mais trop lentement. Il faut « tuer » le roi, pour ainsi dire. Faire la révolution des mentalités. Chasser l’hypocrisie des riches et des cathos. Il faut dépénaliser, en somme.
En gros, ce dábat est traité comme l’histoire de l’oeuf et de la poule. Qui a plus de droits, la mère ou le futur bébé? Franchement, qu’importe? Je ne veux plus voir des jeunes filles mourir.
Vous savez, tout cela ressemble à la Prohibition aux Etats Unis, ou au scandale provoqué par l’invention de la pilule dans les années 1960. On a vu par la suite que l’interdiction ou le tabou n’étaient pas la solution.
*selon l’étymologie latine, ce qui a un rapport avec le coeur, l’affection, pour le meilleur ou pour le pire.
Commentaires