Secret, démocratie et élection du pape

Article : Secret, démocratie et élection du pape
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13 mars 2013

Secret, démocratie et élection du pape

Bon, Habemus Bergoglio. Je ne dirai rien sur le choc qu’a causé cette élection au Brésil, mais le silence qui a suivit l’annonce Place Saint-Pierre en dit long.

Lors d’une conversation avec mon ami Bodrick qui a affirmé que l’élection d’un pape était probablement la meilleure au monde, j’ai eu l’idée d’analyser un thème aussi vieux que la naissance des premières communautés: comment choisir nos gouvernants?

C’est bien le secret qui intéressait Bodrick, je le dis tout de suite.

A l’analyse, donc. La démocratie est un régime difficile à définir. Néanmoins je garde en moi ce que Norberto Bobbio – intellectuel et philosophe italien – avait suggéré pour cerner le sens de la démocratie. C’est ce régime qui éliminera au final le secret de la vie publique. La démocratie est la lutte acharnée contre le pouvoir invisible – les arcani imperi.

Et alors, je me demande bien si une élection comme celle du pape peut-être à juste titre qualifiée de meilleure alors même que le Vatican est l’un des Etats les plus conservateurs – par rapport au secret – de l’histoire.

Certes, le vote est toujours secret mais les faits qui entourent son organisation ne peuvent l’être; encore moins l’exercice du pouvoir.

L’Eglise aura aussi besoin d’un pape modéré au vu des scandales qui ont secoué les couloirs du Vatican, Benoit XVI a eu bien de mal à s’adapter à cette atmosphère digne de l’ère des Borgia.

Gaetano Salvemini, un autre italien qui fut un grand critique du régime de Mussolini regretta son acharnement contre le gouvernement de Giolitti. Il déclara alors: » Je reconnais que j’aurai été plus sage, si j’avais su être plus modéré dans mes critiques contre le système de Giolitti« .

La démocratie serait ainsi un régime taillé pour les plus modérés des politiciens.1fachogaucho

Après l’abdication du pape Benoit XVI plusieurs voix se sont levées pour demander une réforme dans l’église catholique, plus de démocratie et un positionnement plus en phase avec le temps.

Je ne sais pas si c’est vraiment le but de l’Eglise, ni même si cela va de son intérêt; cependant, pour aspirer à un meilleur statut parmi les plus beaux régimes le Vatican devra prendre en compte les considérations que je me permets de citer ici (sans vouloir être arrogant).

Un intellectuel français disait même que la démocratie est un régime sans contenu, et c’est justement là que réside sa force. Dès lors qu’on en défini le contenu, elle court des risques de corruption.

Ça m’a rappelé l’article d’un blogueur malien qui s’interrogeait sur la qualité de la démocratie dans son pays.

Donc, Bouba, pour revenir à ta plainte de l’autre jour, ne sois pas si empressé de trouver un « contenu » à la jeune démocratie malienne.

Pour t’en convaincre, Bouba, je dirai juste que personne aujourd’hui n’est en mesure de définir de manière définitive la justice, l’égalité ou la liberté.

Enfin, pour en finir, comment faire pour que l’Eglise soit à l’image de nos sociétés, une démocratie?

Pour l’instant, la grande communauté des catholiques ne semble pas être préoccupée par le maintient du secret autour de la gestion du Vatican et de l’Eglise.

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Commentaires

josianekouagheu
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Serge honnêtement, il y a vraiment la démocratie à l'église? Tu sais, le vote du pape a toujours été tenu secret. On n'a jamais montré les urnes et tout. Donc moi je ne sais pas si on peut parler là de démocratie. Peut être c'est un secret...
Pour le nouveau pape,Jorge Mario Bergoglio, il a fallu deux tours et un dernier pour voir la fumée blanche... Mais, personne n'a été au vote, seuls les cardinaux savent....

Serge
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@ Josiane, il faut dire qu'aujourd'hui certains sujets se discuttent dans l'église. Mais en gros je trouve contradictoire qu'on ait des attentes mondaines face à l'Eglise. Une église est une église...
Attendons voir pour ce François I

bouba68
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Oui, je te suis Serge. La démocratie! Elle continuera à nous maintenir dans l'illusion qui est qu'elle est la source du salut d'un peuple. C'est du khorti, Serge. Un mensonge.

Serge
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@ Bouba, ne perdons pas espoir... :)

Benjamin
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je suis très content de lire le rapport que vous établissez entre la démocratie et le vote du pape. mais j'ai bien l'impression que vous comparez deux éléments inscrits sur deux registres différents. je ne sait pas si j'arriverai à vous en persuader mais je m'y risque tout de même.
d'abord, l’église Catholique reste une Église. à ce titre, elle se veut, être plus spirituel que mondaine, dans un monde où les hommes sont organisés dans la société dirigée par Dieu. Dieu prenant place, il participerait à toutes les étapes du choix du dirigeant. et ce même dirigeant le sait bien, en tout cas c'est ce qu'à mon avis semble filtrer de son discours au balcon de la place Saint Pierre. je crois bien que ce secret, le manque de communication avec l’extérieur durant le vote (sauf par un moyen rudimentaire et traditionnel qu'est la cheminée), témoigne de cette place où Dieu parle à son peuple, rappelant Moise, lors de la traversée du Désert qui laissait un peu le peuple pour prier sur la montagne. je ne suis pas exégète, je préfère retourner au sujet. donc, pas de candidat, pas de campagne (officielle parce durant plus de 10 jours ils étaient à Rome, faisant ds réunions dans lesquelles, je suppose, ils débattaient des grandes questions du moment et ont pris en conte les prises de décision de tel ou de tel guidant un peu les élections), élections dans un secret total. je me demande même si c'était une démocratie ordinaire où une commission électorale faisait rimer ensemble recensements, listes des candidats, campagnes tambour battant, urnes et consort, ... mais, en quoi ce serait une religion?
Aussi, les politiciens perdent leur temps et leurs moyens dans les campagnes parce qu'ils gagneront au centuple dès lors qu'ils sont élus. par contre, celui qui prend le trône de Pierre sait pertinemment que ce qui l'attend c'est le martyr. il doit porter sa crois jusqu'à l'édifice. Hier, cela semblait sortir de ses dire. parlant de lui même, il a parlé de l'"Évêque de Rome". Inconsciemment, il savait bien qu’être Pape, n'est pas un poste pour hausser ses épaule, être "Chef" mais plutôt pour servir le plus pauvre, voué comme consolateur des laissés pour compte, s'abaisser jusqu'au plus petit,... C'est pourquoi, son Moi était plus confortable dans le fauteuil de l’évêque de Rome que de celui du Pape.
dans cette logique, la papoté me semble une mission reçus de Dieu au delà d'un choix librement et délibérément pris par les cardinaux. C'est même pour cela que le choisit ne refuse pas ce choix porté sur lui contre lui (mieux, contre sa volonté)
les dirigeants politiques sont tout sauf cela. chez eux c'est la lutte effrénée pour conquérir le pouvoir et être "vénérés", s'enrichir,...
je m'en doute encore d’être arrivé à me faire comprendre mais j'ai l'impression qu'il y a peu de logique (dire peu des choses intelligibles) dans la chose de la Foi... ça se vit plus que ça se dit

Serge
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@ Benjamin, merci pour le commentaire. J'avoue que je ne saurai émettre un avis sur le côté spirituel de ce vote. je sais aussi qu'il est imposible d'organiser une élection à l'échelle planétaire, mais je pense que le secret alimente toute sorte de commentaire. et cela ne sert pas à long terme aux intérêts de l'Eglise.

nathyk
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"je sais aussi qu’il est impossible d’organiser une élection à l’échelle planétaire". Serges, je pense que ce n'est pas impossible. C'est comment s'y prendre qui est plutôt inconnu de beaucoup.

Serge
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@ Nathyk, quand je dis impossible je me réfère à tout ce qui entoure une élection démocratique: organiser une élections démocratique à l'echelle planétaire supose une campagne électorale, et c'est là que se situe le problème; y a un vrai risque de manipulation et de clientelisme. comment controler une telle organisation?